Un hacker a réussi à s’introduire dans le terminal d’un tracteur John Deere, pour jouer à Doom, un jeu vidéo de tir. Ce qui semble être un délire de geek est bien plus sérieux qu’il n’y paraît.
Aux États-Unis, et dans plus en plus de régions, des clients de grandes marques (John Deere et General Motors en lice) réclament avec véhémence le droit de propriété; de pouvoir effectuer librement l’entretien, même le plus basique sur des équipements agricoles qu’ils ont acquis (ndlr: et non pas loués), sans devoir être contraints de passer par leur concessionnaire agréé. De son côté, John Deere revendique la propriété de l’ADN, en somme ce qui coule dans les veines de toute machine moderne (celles ayant un Bus Can notamment); une licence implicite pour la durée de vie du véhicule dans le but de le faire fonctionner. Une situation particulièrement ambiguë, entre utilisateurs et fabricants qui a donné naissance au mouvement Right-to-Repair (le droit de réparer). Le site web tractorhacking.github.io recueille d’ailleurs toutes instructions sur la façon dont la protection du fabricant peut être affaiblie.
Un mouvement auquel adhère le hacker australien Sick Codes, qui a donc réussi à pirater le système d’exploitation de tracteurs John Deere. Lors du plus grand salon mondial des hackers, DefCon, à Las Vegas, l’expert en informatique a démontré en direct ses travaux sur le cœur électronique des machines et a avoué que la tâche avait été rude. Un travail de plusieurs mois et plusieurs modules devant être soudés sur le circuit imprimé original du terminal Greenstar 4240 couramment greffé aux machines motorisées John Deere, pour pouvoir intégrer le jeu vidéo Doom, très populaire auprès des pirates de l’informatique.
Playing Doom on a John Deere tractor display (jailbroken/rooted) at @defcon pic.twitter.com/ih0QUTGNuS— Sick.Codes (@sickcodes) August 14, 2022
Sick Codes a également constaté que le terminal du tracteur tentait incessamment d’envoyer de grandes quantités de données au constructeur dès le moment que celui-ci croyait être en présence d’un technicien agréé. Il clôture sa présentation lors du DefCon en évoquant la possibilité, un jour de pouvoir facilement jailbreaker ces systèmes (donc de déverrouiller les fonctionnalités d’un système d’exploitation pour lever les restrictions qu’il impose) grâce à un outil standardisé, qui pourrait être mis à disposition des clients. Une vision que ne partage assurément pas John Deere, qui revendique la violation de droits d’auteur en cas de “fracturation” de tout verrou numérique sur ses logiciels.